Les relations diplomatiques tendues entre le Canada et l'Inde ne montrent aucun signe d'apaisement, ce qui suscite une vive inquiétude parmi les entreprises des deux pays. (Source : Travelobiz) |
« Parler constamment dans les deux sens »
Les relations entre le Canada et l’Inde sont tendues depuis septembre 2023, lorsque le Premier ministre canadien Justin Trudeau a accusé l’Inde d’être responsable du meurtre de Hardeep Singh Nijjar, un citoyen sikh canadien.
Les échanges constants entre les deux parties et les représailles diplomatiques ont commencé à avoir des répercussions sur la population, en particulier sur les étudiants. On estime que deux millions de Canadiens (5 % de la population) sont d'origine indienne, tandis que les étudiants indiens constituent le groupe le plus important (40 %) des étudiants étrangers inscrits au Canada.
Le Premier ministre canadien Trudeau a critiqué le 21 octobre la décision de l'Inde, la qualifiant de sans précédent et de déraisonnable, qui pourrait causer des difficultés à des millions de personnes dans les deux pays, car leurs voyages, leurs échanges commerciaux et leur éducation seraient affectés.
Parallèlement, le ministère indien des Affaires étrangères a affirmé que cette décision était conforme à l'article 11.1 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques. Il a également rejeté toute tentative de considérer la pratique de l'égalité dans les relations diplomatiques comme une violation des normes internationales.
En matière de commerce, avant que les allégations ne soient rendues publiques, le Canada a annulé une mission commerciale en Inde et suspendu les négociations commerciales dont les groupes d’affaires espéraient qu’elles aboutiraient au moins à un accord de libre-échange intérimaire d’ici la fin de l’année.
Les tensions continuent de s’intensifier sans qu’on puisse en voir la fin, comme le montre le retrait de dizaines de diplomates canadiens le 19 octobre. Les chefs d’entreprise affirment que ces événements ajoutent à l’incertitude.
« Les entreprises recherchent clarté, stabilité et prévisibilité, et ces trois éléments font défaut », a déclaré Victor Thomas, président du Conseil d'affaires Canada-Inde. « À bien des égards, nous cherchons encore à comprendre comment naviguer dans cette nouvelle ère. »
L'Inde a joué un rôle majeur dans l'économie canadienne grâce à sa diaspora. On comptait environ 1,3 million de Canadiens d'origine indienne lors du recensement de 2021. Cependant, ces relations commerciales ont connu une croissance disproportionnée.
L'Inde est le huitième partenaire commercial du Canada, avec des exportations de 5,6 milliards de dollars (4,1 milliards de dollars) l'an dernier, soit une fraction des exportations canadiennes vers les États-Unis ou la Chine. La plupart de ces exportations proviennent de l'extraction de ressources naturelles ou de l'agriculture.
Les entreprises sont profondément préoccupées
Les entreprises espéraient qu'un accord commercial pourrait renverser la situation. En mai 2023, les deux pays ont publié une déclaration commune affirmant espérer qu'un premier accord commercial pourrait être signé d'ici la fin de l'année et entraîner une augmentation des investissements dans des domaines tels que les technologies propres.
Cependant, les choses se sont refroidies après l’affaire Nijjar cet été, et les négociations commerciales ont été officiellement reportées en septembre.
« C’est un choc et un revers énorme pour le monde des affaires, car cela crée beaucoup d’incertitude quant à ce qui va se passer ensuite », a déclaré Satish Thakkar, président de la Fondation Canada-Inde.
Les entreprises ont été prudentes lorsqu’il s’agissait d’exprimer publiquement leurs inquiétudes dans un environnement diplomatique tendu, mais les groupes d’entreprises affirment constater une anxiété croissante chez leurs membres.
La suspension des services de visas par l'Inde est particulièrement préoccupante, a déclaré Matthew Holmes, vice-président principal des relations gouvernementales et des politiques à la Chambre de commerce du Canada. « Pour les secteurs à forte intensité de services, comme les technologies de l'information, cela pourrait constituer une grave préoccupation à long terme », a-t-il ajouté.
Selon le président Victor Thomas, les difficultés persistantes de traitement des visas pourraient porter un sérieux coup aux efforts du Canada pour attirer les étudiants internationaux. Selon le Bureau canadien de l'éducation internationale, environ 40 % des plus de 800 000 étudiants internationaux du Canada viennent de l'Inde. Le gouvernement fédéral a également assoupli de plus en plus les règles de travail pour les étudiants internationaux ces dernières années, faisant d'eux une source de main-d'œuvre essentielle pour les entreprises locales.
Le journal India Times a rapporté la semaine dernière que le député Vikramjit Singh Sahney exhortait le gouvernement indien à reprendre le traitement des visas.
Lors d'un événement le 22 octobre, le ministre indien des Affaires étrangères, S. Jaishankar, a déclaré que les préoccupations en matière de sécurité étaient la raison de la suspension des visas pour le Canada. L'Inde reprendra la délivrance de visas si des progrès sont réalisés en matière de sécurité des diplomates en poste dans son pays.
Le Canada a également mis en garde contre les retards dans l’obtention des visas pour les citoyens indiens en raison de menaces présumées envers ses diplomates.
Le président de la Fondation Canada-Inde, Thakkar, espère que les problèmes diplomatiques seront résolus afin que les deux pays puissent continuer à renforcer leurs liens. « L'Inde est un partenaire très important. Pour assurer notre prospérité et notre croissance futures, nous devons renforcer nos relations avec l'Inde. Quels que soient nos problèmes, qu'ils soient gouvernementaux ou politiques, nous devons les résoudre », a-t-il déclaré.
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