Lors du Forum sur le scénario économique du Vietnam 2024, qui s'est tenu le 11 janvier, des experts économiques nationaux et étrangers ont formulé des commentaires et des recommandations sur la croissance économique en 2024. Thoibaonganhang.vn a recueilli leurs avis sur cette question.
2023 – une année résiliente pour l’économie vietnamienne
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M. Nguyen Duc Hien, chef adjoint de la Commission économique centrale :
Promouvoir des mécanismes et des politiques pour créer de nouveaux moteurs de croissance
M. Nguyen Duc Hien : Directeur adjoint de la Commission économique centrale |
À mon avis, il faudra, à l'avenir, stimuler l'investissement privé par des mesures de relance. Actuellement, les mécanismes et politiques spécifiques au secteur économique privé se heurtent encore à de nombreux obstacles, et les mesures prises ne sont pas encore mises en pratique.
Il est crucial de promouvoir des mécanismes et des politiques visant à créer de nouveaux moteurs de croissance pour l'économie. La croissance économique du Vietnam dépend fortement du secteur des IDE et des exportations, notamment dans les secteurs de la transformation et de la fabrication. La résolution 29, adoptée en 2022 par le 13e Comité économique central, définit les orientations à long terme pour l'industrialisation et la modernisation. Cette résolution définit de nombreux programmes et actions, tels que le renforcement et l'amélioration des capacités de production, de conception et de fabrication du Vietnam (Make in Vietnam).
Cependant, nous devons examiner les résultats obtenus par ces mécanismes et politiques et leurs avancées. Nous avons également défini des objectifs pour des mécanismes et des politiques visant à promouvoir six secteurs fondamentaux. L'un des secteurs qui bénéficiera le plus d'un partenariat stratégique global avec les États-Unis est celui des technologies numériques , notamment celui des semi-conducteurs. Quelle est donc cette politique et comment la mettre en œuvre ?
Dans le secteur industriel également, le Politburo a adopté la résolution 52 (publiée en septembre 2019) sur les politiques et stratégies visant à participer activement à la quatrième révolution industrielle. Cette résolution définit l'importante mission de mettre en place des mécanismes politiques pour promouvoir la fabrication intelligente. Cette évolution doit également être appréhendée sous l'angle de la croissance industrielle.
À mon avis, le secteur des services a contribué de manière significative à la croissance économique cette année, avec une hausse de 6,82 %, soit une contribution importante à la valeur ajoutée du PIB. En 2023, le tourisme vietnamien a notamment accueilli 12,6 millions de visiteurs internationaux. Ce chiffre est 3,4 fois supérieur à celui de 2022, dépassant largement l'objectif de 8 millions de visiteurs. Cependant, ce chiffre ne représente que 70 % de celui de 2019, l'année précédant la pandémie de Covid-19. La question est désormais de savoir quels mécanismes et politiques sont nécessaires pour accroître la valeur réelle du secteur des services et promouvoir son rôle important dans l'économie, notamment dans certains secteurs où des politiques de relance sont en cours mais qui rencontrent encore des difficultés, comme l'immobilier.
Cette année, nous enregistrons un excédent commercial, en partie dû à une forte baisse des importations, alors que la structure des importations est axée sur les matières premières destinées à la production nationale. Cette forte baisse des importations témoigne de la solidité interne de l'économie, facteurs qui posent de nombreux problèmes. En 2023, les exportations ont enregistré de nombreux succès, mais ont principalement augmenté avec la Chine, tandis que les principaux marchés comme le Japon, l'UE, les États-Unis, etc. ont tous diminué, alors que nous avons globalement respecté nos engagements internationaux. Dans quelle mesure les accords de libre-échange et les nouveaux marchés ont-ils été exploités, et quelles politiques ont été mises en place pour y remédier ?
À mon avis, une véritable politique de stimulation de l'investissement, notamment privé, est nécessaire. Nous devons examiner en détail la politique d'investissement privé et celle du secteur public. Hormis les projets pétroliers et gaziers, grâce à la détermination du gouvernement, les entreprises publiques n'investissent pas davantage. Elles s'en tiennent à des politiques visant à promouvoir leurs propres investissements.
Par conséquent, les problèmes liés à la loi budgétaire doivent être résolus et partagés. Même l'investissement public doit être évalué et reconnu. La Banque mondiale recommande que, dans le cadre de l'investissement public vietnamien, il soit envisagé de privilégier les investissements dans la science et la technologie, la transformation numérique, en plus des investissements dans les infrastructures. En effet, les investissements dans les infrastructures technologiques et l'éducation sont limités.
Stimuler la consommation est également un enjeu à débattre. À l'approche du Têt, les dépenses d'achat sont également plus faibles que l'an dernier, tandis que les dépôts ont augmenté de 13,5 millions de milliards de dongs… Il est nécessaire de mettre en place un mécanisme permettant d'investir ces flux de trésorerie dans la production et les investissements pour le développement.
Dr Can Van Luc, membre du Conseil consultatif national de politique monétaire et financière :
2024, stimuler la croissance mais ne pas trop s'inquiéter de l'inflation
Dr. Can Van Luc, membre du Conseil consultatif national de politique monétaire et financière. |
Pour créer une dynamique de croissance pour 2024, il est nécessaire, à mon avis, de consolider et de renouveler les moteurs de croissance existants, en se concentrant sur la restructuration de l’économie après une longue période de déclin due à la pandémie et aux retards dans la gestion des entreprises et des projets faibles.
Plus important encore, promouvoir et exploiter de nouveaux moteurs de croissance, en mettant l’accent sur l’accélération du processus d’amélioration institutionnelle, en particulier en guidant la mise en œuvre des lois sur le foncier, le logement, les affaires immobilières, les établissements de crédit, d’autres lois modifiées et les mécanismes de soutien dans le cadre de l’application de l’impôt minimum mondial…
À mon avis, nous devons disposer au plus vite d'un cadre juridique pour les nouveaux modèles économiques et les nouvelles entreprises. Or, si nous voulons développer la science et la technologie, expérimenter de nouvelles choses et développer de nouveaux modèles, nous devons disposer d'un mécanisme de test pour y parvenir.
En outre, il est nécessaire d’élaborer prochainement un projet visant à améliorer la productivité nationale du travail, à renforcer la formation de ressources humaines de haute qualité, à créer un environnement plus ouvert pour promouvoir l’innovation et à établir un Comité national de productivité pour fournir une orientation claire, des mécanismes et des politiques de mise en œuvre.
Promouvoir la croissance verte ; publier des documents complets et opportuns guidant la mise en œuvre de la loi sur la protection de l'environnement de 2020 ; disposer de plans spécifiques pour répondre au changement climatique ; mettre en œuvre la stratégie de croissance verte, le projet de développement de l'économie circulaire et s'engager à atteindre le « zéro carbone » d'ici 2050...
Le Vietnam dispose d'une excellente orientation stratégique, mais le problème réside dans le manque de projets, de programmes et de solutions spécifiques à chaque secteur d'activité. Il est notamment nécessaire de promouvoir davantage les normes et critères relatifs aux projets et aux zones vertes.
Dans un contexte extérieur fragile, nous devons renforcer l'autonomie, l'indépendance et la résilience de l'économie, tant pour les entreprises que pour les collectivités locales. De plus, nous devons nous concentrer sur la création, la gestion et l'exploitation de bases de données et d'informations nationales dans chaque domaine, secteur, localité, organisation et entreprise, ainsi que sur des mécanismes de connexion, de partage et de gestion des risques liés aux données.
Mme Dorsati Madani, économiste principale de la Banque mondiale (BM) au Vietnam :
Le Vietnam doit changer pour restaurer l’économie privée
Mme Dorsati Madani, économiste principale, Banque mondiale |
L'économie mondiale est confrontée à des crises multiples : crise économique, conflit russo-ukrainien, inflation… La Banque mondiale prévoit que l'économie continuera de faire face à de nombreuses difficultés, telles que la baisse de la consommation et l'augmentation de l'épargne publique après de nombreuses années d'utilisation intensive des capitaux et du budget. De plus, le contexte politique sera également amené à évoluer. Actuellement, les taux d'intérêt sont élevés et ne montrent aucun signe de baisse.
À mon avis, la croissance économique en Europe ne s'est pas encore sensiblement améliorée, tandis que la Chine progresse lentement en raison de problèmes internes comme le marché immobilier, malgré les efforts considérables déployés par les autorités pour relancer l'économie. Tous ces facteurs auront un impact profond sur une économie très ouverte comme le Vietnam.
Au Vietnam, l'investissement privé est très faible. À cela s'ajoute un ralentissement de la consommation. Ces facteurs ont besoin de temps pour se redresser. De plus, le marché immobilier est lui aussi confronté à de nombreuses difficultés. Par conséquent, de nombreuses politiques sont nécessaires pour soutenir ces secteurs.
Je pense que le Vietnam doit évoluer pour relancer l'économie privée et relancer progressivement la consommation intérieure. Outre le commerce international, il est également nécessaire de promouvoir le commerce intérieur.
Dans les années à venir, les prix des matières premières pourraient ne pas augmenter, voire diminuer, et l'inflation au Vietnam et dans le monde devrait diminuer. Ces facteurs modifieront les perspectives économiques du Vietnam et du monde.
Nous prévoyons une reprise progressive et graduelle jusqu'aux niveaux d'avant la pandémie. Mais cela nécessitera une gestion politique avisée. Le secteur privé et les entreprises locales vietnamiennes doivent bénéficier d'une attention et d'un développement accrus.
En plus des politiques de relance économique privée, le Vietnam continue de se concentrer sur la transformation verte et la transformation numérique, car il s’agit d’une tendance mondiale inévitable dans les temps à venir.
Nous recommandons des outils politiques sur les taxes et les crédits verts pour soutenir les industries, en éliminant progressivement l’utilisation du charbon et en passant à des énergies propres comme l’éolien et le solaire.
Dans le secteur financier, le gouvernement doit promouvoir les instruments financiers verts tels que les obligations vertes et ne pas les appliquer uniquement aux petites entreprises.
Les banques doivent également disposer d'un plan d'action pour soutenir la stratégie verte du gouvernement. Il est également essentiel de sensibiliser les citoyens et les entreprises.
Je crois que l'avenir du Vietnam réside dans la transformation numérique et écologique. Pour y parvenir, il est nécessaire de mettre en place des politiques macroéconomiques adaptées. Il est également important que la population, la jeune génération et la génération active, soient également sensibilisées à cette tendance.
M. Suan Teck Kin, responsable des études de marché et économiques mondiales, UOB Bank au Vietnam :
Les prévisions de croissance économique du Vietnam pour 2024 sont de 6 %
M. Suan Teck Kin, responsable des marchés mondiaux et de la recherche économique, UOB Bank |
À mon avis, la croissance économique du Vietnam en 2024 est prometteuse grâce aux attentes de baisse des taux de la Fed, à la reprise des exportations et à une croissance stable dans la région...
Certains moteurs de croissance clés, tels que les exportations et l’attraction des IDE, devraient avoir de bonnes perspectives en 2024.
Le Vietnam est bien placé pour continuer à attirer les investissements directs étrangers (IDE). En Asie du Sud-Est, Singapour a toujours été le premier pays à attirer les IDE, suivi par l'Indonésie et le Vietnam en troisième position.
Le Vietnam bénéficie actuellement d'une main-d'œuvre jeune qui assimile rapidement les technologies. Cependant, il est nécessaire d'exploiter d'autres atouts concurrentiels, car le pays devra bientôt faire face au vieillissement de sa population. Plus précisément, le Vietnam doit identifier les points forts sur lesquels il souhaite concentrer ses efforts pour attirer les IDE, afin d'élaborer des stratégies et des solutions adaptées.
À moyen et long terme, le Vietnam doit améliorer sa productivité et son efficacité. À Singapour, le gouvernement organise des discussions annuelles afin de trouver des solutions pour améliorer la productivité du travail et ainsi renforcer la compétitivité du pays. Le Vietnam peut s'inspirer de cette expérience.
En ce qui concerne l'investissement public, la structure des dépenses publiques du Vietnam reste à un niveau raisonnable, se concentrant sur les infrastructures, avec une dette publique d'environ 34 % du PIB, ce qui laisse au Vietnam une grande marge de manœuvre pour étendre sa politique budgétaire.
Pour améliorer la compétitivité du pays, il est recommandé au Vietnam d'investir davantage dans l'éducation, la science et la technologie. Actuellement, le Vietnam est l'un des pays qui consacre le moins de budget à l'éducation, à la reconversion et à la formation pour améliorer les compétences et l'expertise de ses travailleurs.
Je pense que la croissance économique du Vietnam sera de 6 % en 2024.
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