Les attaques contre des cargos dans la mer Rouge ces derniers mois obstruent le canal de Suez, l'une des principales routes commerciales du monde .
Les forces houthies du Yémen ont récemment intensifié leurs attaques contre les cargos traversant la mer Rouge après le déclenchement de la guerre entre Israël et le Hamas début octobre 2023. Elles ont déclaré que cette action visait à témoigner leur solidarité avec les Palestiniens de la bande de Gaza. L'armée américaine et ses alliés ont renforcé la sécurité maritime en mer Rouge, mais les attaques se sont poursuivies.
Les porte-conteneurs ont donc dû éviter le canal de Suez, la voie navigable reliant l'Asie à l'Europe et aux États-Unis. Cette situation a perturbé la chaîne d'approvisionnement mondiale, faisant grimper les prix des produits à un moment où le monde lutte contre l'inflation. Le canal de Suez représente actuellement 10 à 15 % du commerce mondial et environ 30 % du volume mondial de transport de conteneurs.
Alors que les tensions s'intensifient, les analystes estiment que l' économie mondiale sera affectée dans une certaine mesure. Reuters a rapporté que le constructeur de voitures électriques Tesla a quasiment interrompu la production de son usine allemande, les attaques ayant perturbé son approvisionnement en pièces détachées. Volvo Cars suspendra également la production pendant trois jours la semaine prochaine dans son usine belge en attendant les livraisons.
Un porte-conteneurs s'apprête à traverser le canal de Suez. Photo : Reuters
Des distributeurs comme Ikea (Suède) et Next (Royaume-Uni) ont mis en garde contre des retards, des pénuries et une augmentation des frais d'expédition. Le fabricant de chaussures Crocs a indiqué que l'expédition de ses marchandises vers l'Europe pourrait prendre jusqu'à deux semaines de plus. Crocs a indiqué que cela n'avait « pas d'impact » sur ses activités pour le moment, mais qu'il continuerait de suivre la situation de près.
Certains ont commencé à réfléchir à des solutions de secours. Abercrombie & Fitch envisage même d'expédier ses commandes par avion pour éviter les retards.
Les prix du pétrole sont également en hausse. Les prix du Brent et du WTI ont augmenté de 3 % à un moment donné le 12 janvier, en raison des craintes que la guerre dans la région ne se propage et ne perturbe l'approvisionnement.
Dans un rapport publié en début de semaine, la Banque mondiale a averti que les perturbations des principales chaînes de transport de marchandises « aggravent les vulnérabilités des chaînes d'approvisionnement et augmentent les risques d'inflation ». Actuellement, six des dix plus grandes compagnies maritimes de conteneurs au monde, dont Maersk, MSC, Hapag-Lloyd, CMA CGM, ZIM et ONE, ont presque complètement cessé de transiter par la mer Rouge.
Les navires ont été contraints de contourner le cap de Bonne-Espérance en Afrique du Sud, rallongeant ainsi leur trajet de plusieurs semaines. Le PDG de Maersk, Vincent Clerc, a déclaré au Financial Times le 11 janvier que le rétablissement de la sécurité en mer Rouge pourrait prendre « des mois ». « Cela pourrait avoir de très graves conséquences sur la croissance économique mondiale », a-t-il ajouté.
Le même jour, l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale (Allemagne) estimait que les attaques contre des cargos en mer Rouge avaient entraîné une baisse du commerce mondial de 1,3 % en décembre par rapport à novembre. La hausse des coûts de transport a également fait grimper les prix à la consommation. « Plus les perturbations durent, plus l'effet de stagflation sur l'économie mondiale est fort », a déclaré à X la semaine dernière Mohamed A. El Erian, économiste en chef chez Allianz.
Si le conflit entre Israël et le Hamas dégénère en tensions régionales, ou si les Houthis déplacent leurs attaques vers les pétroliers et les navires transportant des matières premières essentielles comme les céréales, le minerai de fer et le bois, les conséquences pour l’économie mondiale seront encore plus graves.
« Si les tensions s'intensifient, l'approvisionnement énergétique pourrait être gravement perturbé, entraînant une hausse des prix. Cela pourrait avoir des répercussions sur les prix d'autres matières premières », indique le rapport de la Banque mondiale.
Capital Economics a également indiqué que le risque le plus important concernait les prix de l'énergie. « Si les perturbations actuelles des transports ne sont pas susceptibles d'inverser la tendance au ralentissement de l'inflation mondiale, l'escalade des tensions militaires continuera de faire grimper les prix de l'énergie, ce qui affectera les consommateurs », ont-ils déclaré.
Oxford Economics prévoit également que l'inflation globale continuera de ralentir. Cependant, le risque de hausse des prix demeure. Les coûts du transport par conteneurs ont désormais doublé par rapport à début décembre. Si cette tendance persiste, l'inflation mondiale pourrait augmenter de 0,6 %.
Les prochaines semaines pourraient être encore pires, car les cargos se précipitent pour expédier leurs produits de Chine avant la fermeture des usines pour le Nouvel An lunaire. « Les cinq semaines précédant le Nouvel An lunaire vont être une période très difficile pour le secteur du transport maritime », a déclaré à CNN Philip Damas, directeur du cabinet de conseil Drewry Supply Chain Advisors.
Le secteur du transport maritime a récemment connu des difficultés, le canal de Panama étant également sous pression en raison de la sécheresse de ces derniers mois. « Pour les entreprises qui doivent transporter des marchandises à travers le monde, la situation est très difficile. Le canal de Panama n'est pas navigable, tout comme le canal de Suez », a déclaré Carolina Klint, experte au sein du cabinet de conseil Marsh McLennan.
Selon les analystes, la situation actuelle va perdurer. Même si les attaques cessaient aujourd'hui, permettant à la plupart des navires de traverser la mer Rouge, l'impact initial se ferait encore sentir. « Les perturbations et les retards prendront beaucoup de temps à se résorber », a déclaré Matthew Burgess, vice-président de la société de logistique CH Robinson.
Ha Thu (synthèse)
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