Que peut faire la Russie pour éteindre les flammes de la guerre ?

Selon un article publié sur le site du Club de discussion Valdaï, trois points ressortent du débat sur le rôle de la Russie au Moyen-Orient. Premièrement, les liens de Moscou avec la région sont anciens et remontent à des siècles, principalement à travers le christianisme et l'islam. Deuxièmement, la Russie entretient des relations solides et équilibrées avec tous les acteurs clés de la région : les États arabes, l'Iran, Israël et la Turquie. Troisièmement, la coopération entre Moscou et Washington est le meilleur moyen de renforcer la sécurité dans la région.

Sur le plan régional, la Russie entretient depuis des siècles des liens culturels et historiques profonds avec les peuples musulmans, son rôle au Moyen-Orient s'étant accru depuis le XIXe siècle. Initialement, ces liens impliquaient la protection des communautés chrétiennes orthodoxes. Au XXe siècle, Moscou a soutenu les Arabes dans leur lutte contre le colonialisme, puis dans leur conflit avec Israël.

Quant aux relations de la Russie avec les principaux acteurs régionaux, Moscou a progressivement renforcé ses liens avec la plupart des républiques arabes depuis les années 1950. Les relations de Moscou avec ces monarchies n'ont été ni totalement amicales ni totalement hostiles. De plus, bien que l'Union soviétique ait été l'un des premiers pays à reconnaître Israël en 1948, ses relations avec Tel-Aviv se sont progressivement détériorées à mesure qu'Israël se rapprochait de l'Occident.

Deux conflits simultanés à Gaza et au Liban, ainsi que l'attaque de missiles iraniens contre Israël, attisent les tensions au Moyen-Orient, tandis que les solutions et initiatives diplomatiques deviennent plus floues que jamais. Photo : AP

La véritable percée de Moscou eut lieu en 1955, lorsque le jeune gouvernement révolutionnaire égyptien, frustré par le refus des États-Unis de fournir des armes, se tourna vers l'Union soviétique. Entre 1955 et 1972, lorsque les conseillers militaires soviétiques furent priés de quitter l'Égypte, Moscou développa des liens extrêmement étroits non seulement avec l'Égypte, mais aussi avec la Syrie, l'Irak, l'Algérie, le Yémen et la Libye. Il ne fait aucun doute que le soutien de Moscou aux États arabes dans leur conflit avec Israël joua un rôle majeur dans le renforcement de leur position internationale. Parallèlement, les relations de Moscou avec l'Iran, Israël et la Turquie furent perturbées par leurs liens avec l'Occident datant de l'époque de la Guerre froide.

Depuis la fin de la Guerre froide, la Russie a réussi à entretenir des relations amicales, quoique interrompues pendant une quinzaine d'années après la visite du président égyptien Sadate à Jérusalem, avec la plupart des républiques arabes. Moscou a transformé ses relations autrefois froides avec ces monarchies en relations mutuellement bénéfiques dans divers domaines, notamment la coopération énergétique et militaire.

Avec la victoire de la révolution iranienne en 1979, Moscou a pu améliorer ses relations avec Téhéran. Depuis, les relations se sont globalement améliorées et la coopération s'est intensifiée, notamment en Syrie. Après la fin de la Guerre froide, Moscou a pu établir de meilleures relations avec Israël et la Turquie. Il est clair qu'au cours de la dernière décennie, les relations avec ces deux pays – bien que parfois tendues – ont atteint des sommets historiques. Ainsi, les relations de Moscou avec les principaux acteurs régionaux se sont nettement améliorées par rapport à l'époque de la Guerre froide.

La Russie renforce sa sécurité au Moyen-Orient

Premièrement, Moscou bénéficie de liens historiques de longue date avec les pays du Moyen-Orient. Cela lui a toujours conféré une compréhension unique et approfondie d'une région proche de ses frontières et qui affecte directement sa sécurité nationale.

Deuxièmement, cet avantage est renforcé par le fait que, contrairement aux États-Unis, Moscou entretient de bonnes relations avec tous les acteurs clés de la région. La Chine bénéficie également de cet avantage, mais elle s'est montrée réticente à s'engager dans toute initiative liée à la sécurité et s'est principalement concentrée sur la promotion de ses intérêts économiques .

Troisièmement, alors que les relations entre la Russie et les États-Unis se détériorent en raison du conflit en Ukraine, il est quasiment impossible d'envisager une quelconque coopération entre les deux pays au Moyen-Orient dans un avenir proche. Cependant, malgré la mauvaise santé des relations américano-russes, Moscou peut encore apporter une contribution importante à la sécurité et à la stabilité au Moyen-Orient et ouvrir la voie à une solution une fois la coopération avec les États-Unis rétablie. Ce rôle pour la Russie est devenu de plus en plus nécessaire et urgent, compte tenu des conséquences profondes et graves de la situation catastrophique à Gaza et de la récente escalade au Liban.

Avec la guerre à Gaza, le modèle de solution régionale a changé. Il ne s'agit plus de « Arabes contre Israël », mais le reste du monde est divisé entre ceux qui observent en coulisses et ceux qui soutiennent un camp à des degrés divers. Aujourd'hui, la quasi-totalité de la communauté internationale est contre Israël et seuls quelques partis le soutiennent, dont les États-Unis. Mais même sur cette question, des changements sont à noter. On peut le constater en se référant aux résolutions adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies depuis octobre 2023, la dernière en date du 18 septembre (résolution ES-10/24 sur l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice, où seuls 14 pays ont voté pour Israël, 43 se sont abstenus et 124 ont voté contre).

Que peut faire la Russie au Moyen-Orient ?

Bien entendu, aucune solution aux problèmes qui affligent la région ne sera trouvée tant que la Russie et les États-Unis n'auront pas rétabli une forme de compréhension et de coopération mutuelles. Que peut donc faire la Russie pour améliorer la situation sécuritaire dans la région ?

Premièrement, les relations de la Russie avec Israël n'ont jamais été aussi bonnes, malgré des revers temporaires dus au conflit en Ukraine. Malheureusement, sous l'administration israélienne actuelle, les perspectives de résolution du conflit du Hamas, sans parler de l'occupation israélienne de la Syrie et du Liban, sont quasiment nulles. Le maximum qui puisse être obtenu est un cessez-le-feu, une aide humanitaire, le retour des Gazaouis dans leurs foyers et la levée des mesures qui aggravent la situation en Cisjordanie. Par ailleurs, la priorité absolue est de mettre rapidement un terme aux attaques israéliennes contre le Liban et d'assurer la stabilité de la frontière israélo-libanaise.

Deuxièmement, la Russie peut également contribuer là où elle est directement impliquée, à savoir en Syrie, en Libye, au Soudan et en Iran. La situation en Libye et au Soudan a peu de chances d'être résolue rapidement en raison de profondes divisions internes qui semblent empêcher toute compréhension mutuelle. Moscou entretient de bonnes relations avec toutes les parties impliquées, qu'elles soient locales ou régionales, principalement avec l'Égypte, la Turquie et les Émirats arabes unis (EAU). La Russie entretient également des contacts avec les parties au conflit.

La Syrie et l'Iran forment un groupe à part, quoique pour des raisons différentes. Mais surtout, ces pays sont liés, car les principaux acteurs en Syrie sont Ankara et Téhéran. L'élimination de la présence iranienne et turque en Syrie est cruciale pour la stabilité à long terme du pays, ainsi que pour les relations d'Ankara et de Téhéran avec les pays arabes.

Troisièmement, les priorités de la Russie ont toujours été la sécurité régionale au Moyen-Orient et la non-prolifération nucléaire. Les relations de la Russie avec l'Iran peuvent également servir à résoudre les problèmes de sécurité régionale et mondiale. Pour y parvenir, il est nécessaire de reprendre les négociations avec l'Iran au format P5+1, ainsi que de relancer les efforts visant à mettre en place un système de sécurité régional. La mise en place d'un tel système nécessite un processus complexe et de longue haleine, et ne sera pas envisageable dans un avenir proche.

Source : https://congthuong.vn/chien-su-trung-dong-nga-co-the-lam-gi-de-dap-tat-ngon-lua-chien-tranh-353466.html