Professeur de journalisme David Grunewald, Université libre de Bruxelles (ULB, Belgique).
Qu'il s'agisse d'un outil puissant, d'un allié ou d'une menace, les deux experts s'accordent à dire que l'IA a profondément transformé le journalisme. David Grunewald a affirmé : « L'IA offre de nombreuses opportunités, mais pose également de réels défis aux rédacteurs en chef et aux journalistes. »
En termes d'opportunités, l'IA contribue à accélérer la collecte, la recherche et l'analyse des informations et des données. Les technologies d'IA générative aident non seulement les rédacteurs à créer du contenu, mais permettent également de créer rapidement plusieurs versions d'articles, d'images et de vidéos illustratives, contribuant ainsi à optimiser le processus de publication.
Cependant, au-delà de ses avantages exceptionnels, l'IA suscite également de sérieuses inquiétudes. M. Alain Gérard a averti : « L'un des plus grands dangers est que l'IA puisse progressivement remplacer les vrais journalistes, des personnes en chair et en os comme vous et moi. »
Pour illustrer ce point, M. Gérard a raconté l'histoire de la photo qui a remporté le premier prix d'un concours international de photographie organisé par Sony en 2023. Après avoir reçu le prix, l'auteur a publiquement admis que la photo avait été entièrement créée par l'IA. Il a souligné : « Il est important de souligner que même les meilleurs experts ne peuvent pas distinguer le vrai du faux. Cela illustre la puissance, mais aussi le grand danger que peut représenter l'IA générative. »
En matière de journalisme de données, les deux experts estiment que l'IA peut facilement dominer ce domaine. Selon David Grunewald, il existe un domaine du journalisme que l'IA peut totalement prendre en charge : le journalisme de données. L'IA peut rédiger des articles synthétisant des données et des statistiques événementielles très rapidement et avec précision. Il a commenté : « Cela donnera aux journalistes plus de temps pour enquêter, approfondir leurs recherches et développer des formes de journalisme plus pointues. »
Cependant, M. Grunewald a également mis en garde contre le risque que l'IA crée des fausses nouvelles, de fausses vidéos utilisant cette technologie (également appelée deepfake), des informations déformées et que la diffusion de ces faux contenus devienne plus facile que jamais. Il a affirmé : « Le rôle de la presse est de maintenir sa position de lieu de vérification de l'information, de pivot de la vérité. C'est l'un des plus grands défis du journalisme. »
Dans un contexte de vague de fausses nouvelles, de formation de l’opinion publique et de domination croissante de la technologie de l’IA, le rôle des journalistes au 21e siècle est devenu plus vital, non seulement en tant que reporters d’information, mais aussi en tant que défenseurs de la vérité.
Alain Gérard a souligné que la mission principale des journalistes aujourd'hui est de garantir l'authenticité de l'information. « Je dis souvent à mes étudiants de faire la distinction entre “communication” et “information”. Communiquer, c'est copier, transmettre l'information disponible. Or, le journalisme, c'est questionner, vérifier, comparer et vérifier cette information. C'est le cœur du journalisme », a déclaré Gérard.
Alain Gérard, professeur de journalisme, rédacteur en chef du magazine Latitude.
Les journalistes doivent être présents sur les lieux, accéder aux sources officielles, interviewer les parties concernées et traiter l’information selon les principes d’objectivité, de transparence et d’adhésion au principe « 5W 1H » (Qui, Quoi, Où, Quand, Pourquoi et Comment).
Selon M. Gérard, l'explosion de l'IA ne fait que rendre le principe de vérification de l'information plus important que jamais : « Sans sources fiables, nous ne savons pas d'où vient l'information. La société sera alors dirigée par des machines que chacun pourra programmer à sa guise. »
Les deux experts encouragent les journalistes à ne pas se détourner de l'IA, mais à la considérer comme un outil puissant dans leur travail. « Considérez l'IA comme un compagnon, un assistant, tout en restant le conducteur », a souligné Grunewald. « Lorsque les journalistes comprendront et sauront exploiter le potentiel de l'IA, ils auront plus de temps pour approfondir des sujets plus importants. »
« Si les journalistes n'apprennent pas et ne s'adaptent pas, ils seront comme les dinosaures qui dominaient autrefois, mais qui ont disparu faute d'avoir évolué assez vite pour s'adapter au nouvel environnement », a déclaré Alain Gérard. « Pour éviter d'être éliminés, les journalistes du XXIe siècle doivent continuellement perfectionner leurs compétences multimédias : textes, images, vidéos, audio et podcasts. »
Bien que l'IA prenne de plus en plus le pas sur de nombreux aspects du journalisme, les deux experts affirment que l'humain reste irremplaçable au cœur du journalisme. Enquête de terrain, analyse contextuelle, questionnement critique, éthique professionnelle et défense de la vérité sont des éléments fondamentaux que seuls de vrais journalistes peuvent maîtriser.
« L’avenir du journalisme n’est pas un choix entre les humains et les machines, mais une collaboration intelligente entre les deux pour mieux servir le public », a conclu David Grunewald.
Avec le développement rapide de l'IA, le journalisme du XXIe siècle entre dans une période de transformation profonde et sans précédent. Dans ce contexte, comme l'ont souligné les experts, seuls les journalistes qui préservent leur intégrité professionnelle, savent utiliser la technologie comme un outil de soutien, apprennent, innovent et restent fidèles à la vérité peuvent continuer à remplir leur noble mission : fournir au public une information précise, objective et fiable.
Article et photos : Huong Giang (Agence de presse vietnamienne)
Source : https://baotintuc.vn/thoi-su/co-hoi-thach-thuc-va-trach-nhiem-nguoi-lam-bao-trong-ky-nguyen-ai-20250618073625369.htm
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